Les Eudistes, de la persécution en France à l'exode sur la Côte-Nord du Québec
«Aucune congrégation religieuse ne peut se former sans une autorisation donnée par une loi qui déterminera les conditions de son fonctionnement. Elle ne pourra fonder aucun nouvel établissement qu’en vertu d’un décret rendu en conseil d'État. La dissolution de la congrégation ou la fermeture de tout établissement pourront être prononcées par décret rendu en conseil des ministres.» (art.13)
La congrégation des Eudistes ne sera pas «autorisée» par ordre d’Émile Combes (photo - Archives des Eudistes) président du Conseil des Ministres.
Le «père Combes» ainsi nommé car éduqué dans un séminaire était en fait médecin. Chargé des cultes, il montrera un fort anticléricalisme par les lois de 1901 et 1904 sur le droit des associations et l'interdiction d'enseignement par les congrégations religieuses. 2 500 établissements d'enseignement privés sont fermés, mais certaines congrégations (les sœurs des pauvres, les religieuses hospitalières, les cisterciens, les trappistes, les religieuses contemplatives et les missionnaires) restent autorisées Pour les congrégations désormais interdites, leurs membres doivent quitter le territoire français. Le gouvernement décide l'expulsion des communautés récalcitrantes. Des fonctionnaires ou officiers protestent et parfois démissionnent. Une crise politique grave se dessine. Le ministère Combes décide d'épurer l'administration et l'armée et de favoriser les bons républicains. Combes affirmera que la lutte contre l'Église fortifie et glorifie la République. Il adopte une attitude volontiers provocatrice, par exemple en inaugurant le 13 septembre 1903, à l'heure de la messe, la statue d'Ernest Renan au pied de la cathédrale de Tréguier, sous la protection de 6 000 soldats.
Source: Wikipedia, Émile Combes
Devant une assemblée de 200 personnes à Abbeville le 1er mai 1903, le Père Létendard est décidé de résister jusqu'à la prison à l'injuste tyrannie. Cependant le Père Ange Le Doré (photo), supérieur général, l'un des principaux chefs de la lutte des congrégations s'attendait à un refus d'autorisation. Il tranche donc. Il faut sauver les oeuvres des collèges comme celui de Saint-Martin de Rennes même si le prix à payer est de les céder à l'état et pour les Eudistes, de quitter, définitivement.
Photographie | Saint-Martin de Rennes - Archives des Eudistes
Le Père Gustave Blanche (photo) ancien officier à l'origine des premières fondations canadiennes fait deux voyages au Texas et en Nouvelle-Orléans, à New-York et à Rimouski. À partir de 1890. les premiers eudistes arrivent en Nouvelle-Écosse. À partir de 1903, le Père Blanche prend charge de la préfecture apostolique du golfe Saint-Laurent. À l'instar de l'Acadie où les Eudistes sont déjà bien implantés, la Côte-Nord devient une nouvelle terre missionnaire pour la congrégation.
Photographie | La corvette de Mgr Blanche - Archives des Eudistes
Né le 30 avril en 1848 à Josselin (diocèse de Vannes), de Louis-Marie-Antoine Blanche et de Marie-Caroline Hayard, Gustave-Marie Blanche va sous les drapeaux à 21 ans à cause de la guerre qui éclate en 1870. En 1873, il entre au noviciat des pères Eudistes et est ordonné prêtre le 16 mars 1878. Il vient en Nouvelle-Écosse en 1890 pour fonder une mission et le collège de Church Point. En 1899, il est rappelé en France, mais revient en 1902. En 1903, on le nomme à Chicoutimi préfet apostolique du golfe du Saint-Laurent, puis vicaire apostolique en 1905. Il est provincial des Eudistes avant sa nomination comme préfet.
Il va résider à Pointe-aux-Esquimaux [Hâvre St-Pierre] et en 1906, il s’installe à Sept-Îles. De passage à Paris le 27 juillet 1916, il meurt subitement au cours d’une séance de l’assemblée générale de sa congrégation. C’est monseigneur Patrice Chiasson qui lui succèdera, l’année suivante, comme vicaire apostolique.
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
Il s'agit de Manicouagan, Rivière-Pentecôte, Sept-Îles, Rivière-au-Tonnerre, Magpie, Pointe-aux-Esquimaux et Natashquan. Ils ont entre 27 et 55 ans. On retrouve: Joseph Robin, Arthur Rivest, Louis Héry, François Hersy, Joseph et Étienne Gallix et Louis Garnier. Jean-Marie Conan, Auguste Brezel (photo), François Pétel et Auguste Tortellier y périrent noyés et Jean Le Jollec mourût d'un accident de chasse.
Photographie | Départ des Pères - Archives des Eudistes
Source: Laperrière, Guy, Les Congrégations religieuses: Au Plus fort de la tourmente 1901-1904, P. 342
Augustin Brézel est né le 3 novembre 1868 à Fougères, Ille-et-Vilaine, diocèse de Rennes, France. À 13 ans, il est admis au juvénat Saint-Louis à Plancoët (Côtes-du-Nord) et termine son collégial à Saint-Sauveur-de-Redon près de Saint-Martin-de-Rennes. Puis, en 1888, il entre au noviciat de Kerlois et après, à celui de La-Roche-du-Thiel où il est ordonné prêtre le 18 juin 1893. Il opte pour le Canada et fait partie du premier contingent d’Eudistes qui arrivent au mois de septembre 1903 à Saint-Eugène-de-Manicouagan (Vieux-Poste). Il exerce son ministère à cet endroit et dans les autres postes environnants. Il était doué pour la peinture. C’est lui qui décora l’intérieur de la chapelle de Saint-Eugène. Il acheva la construction de l’église et du presbytère de Saint-Eugène et releva l’église et l’école de Bersimis.
On le voit avec le père LeStrat en 1907, mais en 1909 il est seul à Manicouagan puisque la scierie a pratiquement cessé ses activités.
Il périt à Bersimis le 7 décembre 1911, alors qu’il sombra à travers la glace sur la rivière du même nom. On retrouva son corps le 9 mai 1912 à Cap-au-Renard et il fut inhumé à Pointe-au-Père.
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
Fondé par le Père Joseph Laizé, ce «courrier mensuel de la Préfecture Apostolique du Golfe St-Laurent» fut publié de 1903 jusqu'en juin 1905.
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Ce récit par le Père Joseph Laizé, tiré de l'Écho du Labrador, raconte son arrivée avec le Père Louis Nonorgues (photo) sur la Côte-Nord du Québec.
Il était 11 heures du soir lorsque le steamer «King Edward», à bord duquel se trouvait tout le personnel nouveau de la Préfecture apostolique, stoppa à la petite baie où viendra se perdre la timide rivière Pentecôte. Il faisait nuit noire le vent était contraire et la mer très basse...
Photographie | Rivière-Pentecôte - Archives des Eudistes
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Joseph-Jean-Marie Laizé naquit à Parigné, près de Fougères, Ille-et-Vilaine, France, le 17 août 1875. Il se fait eudiste et arrive au Canada avec le premier contingent, et devient curé de Rivière-Pentecôte en 1903. Il est accompagné du père Nornogues et y demeure jusqu’en 1905. Dès son arrivée, il fonde le premier journal de la Côte-Nord, L’Écho du Labrador, journal de six pages imprimé sur de papier à écrire ordinaire, dont le dernier numéro a paru juste avec son départ. En effet, le père Laizé a été dépêché au Nouveau-Brunswick en 1905.
Il a été mobilisé et est retourné en France. Il meurt le 21 mars 1940.
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
Ce récit par le Père Arthur Divet (photo), tiré de l'Écho du Labrador, raconte sa rencontre avec les familles de Natashquan.
Nous sommes arrivés ici lundi matin, 31 août, vers 8 heures et demie. Je ne sais si le P. Gallix avait envoyé une dépêche, comme nous l’en avions prié, mais personne n’était averti. Il se trouvait heureusement des gens venus au «King» pour prendre des provisions...
Photographie | Natashquan, QC, vers 1870 - Musée McCord MP-0000.1828.67
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Arthur Divet est né le 14 novembre 1876 à Janzé, Ille-et-Vilaine, France. Il se fait eudiste et vient tout jeune au Canada avec le premier contingent qui débarque sur la Côte-Nord en septembre 1903. Il est envoyé immédiatement à Natashquan; puis de 1904 à 1912, il exerce son ministère à Sept-Îles, de 1912 à 1915 à Rivière-Pentecôte, de 1915 à 1916 à Sept-Îles. Il y revient en 1917 avec mission de reconstruire l’église incendiée et y demeure jusqu’en 1936. Il est décédé en 1957 à Laval-des-Rapides.
On dit de lui qu’il avait un caractère original, tempérament brusque avec franc-parler, coeur d’or et esprit dévoué. Il fut vénéré de ses paroissiens qui ont ri de ses colères.
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
Ce récit par le Père Ferdinand Pottier (photo), tiré de l'Écho du Labrador, raconte entre autres la visite du Père Blanche à la Pointe-aux-Esquimaux (Hâvre St-Pierre).
La Pointe aux Esquimaux ressemble assez au poste des «Sept-Îles». En face de nous, à un mille ou deux, se trouve l’île du Havre, longue de 3 à 4 kilomètres, bordée de rochers de calcaire et couverts de bouleaux et d’épinettes. C’est un abri précieux contre les vents du sud; la mer y est profonde, on pourrait y abriter toute une flotte...
Photographie | Le Douro - Scottish Build Ships
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Ferdinand-Marie-Victor Pottier est né le 21 novembre 1854 à Étrelles, près de Rennes, Ille-et-Vilaine, France. Il se fait eudiste et fait partie du premier contingent qui aborde sur la Côte-Nord en septembre 1903, pour être affecté à Havre-Saint-Pierre jusqu’en 1905, comme curé.
En 1913, il rentre en France et y meurt le 20 janvier 1925.
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
Ce récit par le Père Louis Héry (photo), tiré de l'Écho du Labrador, raconte la visite à Rivière-au-Tonnerre.
Good morning! We are well, thank you! – En réponse à votre aimable envoi et pour que l’on entende encore un écho des missions de la Préfecture du Golfe du St-Laurent, voici un petit message qui ne fera peut-être pas grand bruit, bien qu’il vienne de la Rivière au Tonnerre...
Photographie | Rivière-au-Tonnerre - Municipalité de la Rivière-au-Tonnerre
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Ce récit par le Père Louis Garnier (photo), tiré de l'Écho du Labrador, raconte la visite de Manicouagan à la Pointe-aux-Outardes.
Manicouagan! Si vous saviez quel bel emplacement c’est!... Je ne crois pas qu’il ait beaucoup de sites pareils au monde! C’est une petite baie formée par la Manicouagan et au large d’une lieue à peu près, en face de notre presbytère. – Je n’ai pas besoin de vous parler des rues ni des trottoirs ils ressemblent tant à ceux de Pentecôte...
Photographie | Rivière Manicouagan - Wikipedia
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Le père Louis Garnier, eudiste, est né à Javen, près de Fougères, le 21 août 1871. Il est ordonné prêtre à Paris le 22 septembre 1894. Après avoir été professeur à Rennes et à Redon, il fait partie du contingent des Eudistes qui débarquent à Saint-Eugène-de-Manicouagan. Mais, il n’y reste que deux ans, de 1903 à 1905. Il est ensuite économe au collège de Church Point de 1905 à 1907, vicaire à l’île d’Anticosti de 1907 à 1908, curé de Natashquan de 1908 à 1918, de Rivière-au-Tonnerre de 1918 à 1945, et assistant à Baie-Comeau où il écrit Du cométique à l’avion.
Il meurt à l’hôpital Saint-François-d’Assise de Québec le 6 mai 1950 à l’âge de 79 ans. L’écrivain Robert Parisé, l’appelle «le curé Labelle de la Côte-Nord».
Source: Ville de Baie-Comeau, Répertoire des Toponymes, 2011
L'intéressant volume du Révérend Père Louis Garnier [du Cométique à l'avion] ouvre nos yeux sur une histoire admirable et presque inconnue [des] premiers missionnaires Eudistes [...] Nos compatriotes pourront contempler le tableau des origines et du développement apostolique de la Côte-Nord. - N.-A. Labrie
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