Le père Denis Doucet est né au Cap Breton en 1894. Durant la première guerre mondiale il se retrouve en Normandie à partir d’août 1914. Il revient au Canada en 1920 et devient curé de Betsiamites jusqu’en 1941. Ses reportages vidéos sur la Côte sont remarquables.
Quiconque, au Canada voulait devenir Eudiste au début du siècle, devait s’attendre à vivre toute une aventure. Pour moi, ce fût d'abord mon entrée au Juvénat de Church-Point en septembre 1909. J’entrai aux Éléments—latins. Un mois plus tard, je me trouvais en Versification.
Le saut était trop considérable. Une maladie passagère et une faiblesse en français, firent que de demandai à reprendre la Versification en septembre suivant. J’avais alors 16 ans. Après la Rhétorique, en 1913, c'était le moment d'entrer au Noviciat. Le petit nombre d'aspirants-canadiens ne justifiait pas encore le maintien d'une Maison de Jeunes au pays. Mais contrairement à ce que l'on pourrait penser ce n'est pas vers la France qu'on nous dirigeait mais vers la Belgique, à Gyseghem, petite localité située en pays flamand à 50 km environ de la ville de Bruxelles.
Arrive la guerre 1914 et nous dûmes fuir bravement devant l'invasion allemande. Une chatelaine française, amie des Eudistes, Mme Letourneur, nous accueillit dans son château de Coupigny. Pendant trois ans, nous avons joui de 1'hospitalité de cette généreuse comtesse. Puis ce fut le vieux château de Lébisey, là où terminai mes études théologiques. Nous étions en pleine terre eudiste, entre la Manche et la ville de Caen...
En juillet 1920, après sept ans d'absence, je revenais au Canada pour y recevoir l’ordination sacerdotale des mains de Mgr. Patrice Chiasson, mon compatriote et confrère eudiste. Il faisait bon de prendre ensuite quelques semaines de vacances avec la famille. Mais le temps des obédiences était arrivé. On m'assigna un poste à Church-Point et j'y fis expédier mes bagages. Mais je ne devais jamais remplir la première fonction qui m'avait été assignée. Le lendemain de mon ordination, Mgr. Chiasson me proposa d'aller le rejoindre dans son Vicariat du Golfe St-Laurent. J’aurais à apprendre une nouvelle langue et à occuper des Indiens montagnais de la Côte-Nord. J'objectai que j’avais déjà mon obédience en poche. Mais le Père Provincial avait donné son accord, au cas où j’accepterais l’invitation de Mgr. Et j'acceptai. Apprendre une nouvelle langue aussi peu connue que le montagnais, consacrer ma vie à l'évangélisation des Indiens du Nord, c’était, pour moi, un cadeau du Ciel...
Le 5 octobre 1920, je débarquai donc à Betsiamites, réserve indienne de la Côte-Nord , en compagnie du Père A. Jauffret. Le train m'avait conduit jusqu'à Rimouski. Le reste du voyage s'était fait par bateau. Disons d’abord qu'à cette époque, les moyens de communication étaient un courrier intermittent et le télégraphe. Pas question de téléphone. Les moyens de transport: le bateau en été, les chiens en hiver.
À Betsiamites, nous fûmes accueillis par le Père A. Tortellier. II sera mon professeur dans l’étude de la langue montagnaise. À tous les matins après ma messe et mon bréviaire, je me mettais à l'étude de cette difficile langue. Au bout d'un certain temps, j'arrivais à les comprendre et à me faire comprendre. Pendant 21 ans j'ai fait du ministère auprès des montagnais, si sympathiques et combien attachants. Huit ans durant, à tous les étés, je me faisais missionnaire itinérant. Je visitais plusieurs réserves indiennes: Sept-Îles, Mingan, Natashquan, Musquarô, La Romaine et St-Augustin...
En 1941 j'étais transféré à Sept-Îles, à la paroisse des Blancs , en remplacement du Père Etienne Régnault. Je restai là pendant 12 ans comme curé tout en ayant la charge de la réserve indienne jusqu’à l'arrivée des Oblats.
Voici donc, un petit 11 minutes d'image concernant le secteur Colombier jusqu'à Pointe-aux-Outardes. Vous y verrez :
- Départ de familles montagnaises de Betsiamites vers leur territoire d'hiver.
- Images des bûcherons de la rivière Bersimis, de la ferme de Betsiamites, de pêcheurs de Pointe-Lebel ou Pointe-aux-outardes,
- On y parle aussi de Ruisseau-Vert, le futur village de Ragueneau et du Banc des Blancs (ou Moulin Bersimis, petit hameau habité par des Blancs près de la réserve), du début de l'aviation et du service postal.
- De la bénédiction de la chapelle des Islet-Jérémie. Du début de l'arrivée des colons dans ce secteur, de fantastique images de la première école de Colombier, la première église de Ragueneau, la scierie.
Marie Tremblay
Textes: Pierre Frenette
Narration: Pierre Stea
Montage: Yvan Beaulieu, Mauro Pelo
Réalisation: Kateri Lescop
Production: Radio-Québec Côte-Nord